mardi 30 avril 2013

Patients qui me quittent

L'épouse du patient décédé subitement vient de me quitter, et sa fille quelques mois avant avait fait de même; je finis par penser qu'il ramenait toute sa petite famille chez moi alors qu'elle n'était pas très motivée. Il a (presque) quand même assisté à une de mes petites défaillances, alors que enceinte, je vomissais tripes et boyaux y compris pendant les consultations. 

Ca me fait penser à une anecdote il y a quelques années: j'avais un patient retraité fidèle, on avait l'occasion de se fréquenter en dehors du cabinet en milieu associatif. Les consultations étaient très vivantes et tout allait bien entre nous, moi médecin, lui patient. Or un matin je le vois à 9h, il me quitte à 9h20 et d'un coup à 10h son épouse déboule dans mon cabinet en hurlant: " Il est où mon mari?" Elle l'a cherché jusqu'aux toilettes. 
Je ne l'ai jamais revu. Il a dû y avoir un drame conjugal. Mais d'après son œil vif et sa prestance, il n'avait pas besoin de moi pour prendre un peu l'air de son milieu familial. 


lundi 29 avril 2013

dépistage superflu et anxiogène

Je reçois un coup de fil ce jour:
" Bonjour, c'est monsieur Z de la société X. Ce n'est pas du tout une démarche commerciale. Nous vous proposons de détecter l'asthme jusqu'à dix ans avant qu'il ne se déclare, et la BPCO ( broncho-pneumopathie chronique obstructive) jusqu'à quinze ans avant. Naturellement il faut avoir le matériel adéquat." 

Il a insisté, et encore et encore, jusqu'à ce qu'il comprenne enfin le NON que je lui répétais. Puis il a téléphoné à mon associée sans savoir que je réponds généralement et que je lui passe la ligne.  J'en ai profiter pour la mettre au parfum.

Pourquoi je ne suis pas d'accord? Ne pourrait-on pas laisser quelques années de répit à mes asthmatiques et mes fumeurs qui ont bien d'autres arguments pour arrêter leur tabac? Ca veut dire qu'ils vont vivre dans la peur de l'avenir durant quelques années pour une maladie qui de toute façon va leur tomber dessus? Je regrette, il y a des limites au dépistage. 

Et puis, est-ce la nouvelle mode que de démarrer une vente par téléphone  en commençant par " Ce n'est pas une démarche commerciale?

Harcèlement au travail

J'avais déja écrit l'histoire de cette patiente qui a gagné 6000 euros grâce à mes petits conseils? Elle souffrait de harcèlement au travail et ne savait plus comment remonter la pente. Je lui ai conseillé de constituer un dossier de harcèlement en béton, et le jour où elle s'est présentée devant son patron et lui a posé le dossier sur la table, il l'a ouvert, l'a refermé puis lui a dit:  "je pense que l'on peut s'arranger" et il a fait le chèque devant elle.

Ce matin j'ai reçu une patiente dans le même cas, elle souffrait de harcèlement objectivé par:
- ne plus prendre ses pauses avec ses collègues;
- la supérieure n'avait jamais un compliment envers elle, plutôt des reproches et devant les collègues;
- Elle l'appelle tous les vendredis dans son bureau de 17 à 19 heures pour lui répéter combien elle est nulle et incompétente ( son heure de sortie est 17 heures);
- elle lui morcelle ses vacances sans raison;
- elle l'harasse de travail etc. 

Je lui ai raconté l'histoire de la femme qui s'était vaillamment battue et avait gagné, et lui ai vivement conseillé de faire de même. 
" Mais docteur, je suis tellement fatiguée, je veux que tout ça se termine, si je trouve un travail je démissionne. Je me sens nulle. Je comprends les gens qui se jettent sous un train pour en finir". 
A quoi j'ai répondu " si vis pacem para bellum" ( si tu veux la paix prépare la guerre), car si elle ne fait rien, que va-t-elle devenir? 

dimanche 28 avril 2013

Nouvelle indication de Séroplex

J'ai eu l'occasion d'examiner une quinquagénaire en l'absence de son médecin traitant. Grosse fumeuse, elle cumule tout ce qui est possible chez une personne de son profil: coronaires bouchées, artères bouchées, ablation des glandes salivaires car menace de cancer ( pour cette dernière chose je ne suis pas très sûre). Et évidemment elle prend un traitement lourd à visée cardio-vasculaire... et du Séroplex ( antidépresseur).
" Vous avez fait une dépression madame?
- Non, mais mon cardiologue préfère me le prescrire au cas où je déprime". 

Je lui ai évidemment détaillé les effets secondaires du Séroplex, elle n'était pas ravie.
NB: la prévention des dépressions chez quelqu'un n'en ayant jamais fait n'est pas mentionnée dans les indications du produit.

Priligy


Ejaculation précoce, le nouveau médoc !


 Priligy® vient de sortir. C’est un nouveau médicament contre l’éjaculation précoce dont la molécule s’appelle la Dapoxétine.<


La Dapoxétine, ça sert à quoi ?
Le Priligy® a comme action de ralentir l’éjaculation. Quand un garçon souffre d’éjaculation précoce, c’est une des solutions possibles…
La Dapoxétine, ça se prend comment ?
Pour éviter l’éjaculation trop précoce on prend un comprimé de Prilily® une à 3 heures avant un rapport sexuel. Et il ne faut pas en prendre plus d’un par 24 heures. C’est la dose maximale. L’idéal est de le prendre avec un grand verre d’eau, car cela diminue le risque d’effets indésirables.
La Dapoxétine, ça agit comment ?
Le Priligy® multiplie par 3 la durée du rapport sexuel à partir de la pénétration. Si par exemple, ça ne durait que 1 minute, ça va durer 3 minutes avec médoc, donc l’éjaculation n’est plus aussi précoce. C’est un changement déjà énorme. Et si ça durait déjà 3 minutes, on arrive à presque 10 mn sous traitement…
La Dapoxétine ralentit tout simplement le réflexe de l’éjaculation en agissant au niveau du cerveau sur un neurotransmetteur, la sérotonine.
La Dapoxétine, est-ce que ça suffit ?
Le Priligy® augmente la durée du rapport sexuel. Mais ce médicament ne change pas le réflexe pour toujours. Pour apprendre à éjaculer moins rapidement, il faut associer des exercices pour que le corps expérimente une autre manière de fonctionner… Quels exercices ?
La Dapoxétine + les exercices, c'est encore mieux !
Quels exercices ? Mate un peu...



Ben non, je ne suis pas convaincue. Ce produit est un antidépresseur et on les met à toutes les sauces pour faire marcher le commerce.
Le fils de mon compagnon a même été un peu choqué car on fait de la pub  à la télé contre l'éjaculation précoce aux heures de grande écoute. Décidément ils n'ont peur de rien!

Notez bien,nulle part il n'est écrit que c'est un antidépresseur, et même pas dans la pub insérée dans Le Quotidien du médecin et Le Généraliste, même pas écrit en tout petit. 

vendredi 26 avril 2013

hier encore.

Et encore hier: une patiente a refusé de faire un scanner abdominal alors que la phlébologue l'avait conseillé devant un fibrome utérin et une grisaille diffuse abdominale. Je n'ai pas un bon pressentiment. Aujourd'hui elle s'est accrochée à mon cou " Docteur je vous adore, vous êtes mon sauveur" répétait-elle en pleurant.

Et entre deux, un jeune un peu perdu est venu causer avec moi de son mal de vivre et de son souhait de vivre au sud du Chili. Et on s'est mis à rêver... Agréable récréation dans une journée difficile à vivre.

Journée pâteuse

Hier la journée n'avait pas trop bien démarré, pâteuse est le mot que j'emploierais.
- J'ai appris que le fils de fidèles patients s'était jeté par la fenêtre sous l'influence de H, de psychotropes? Il est entre la vie et la mort.
- Puis une patiente est arrivée entre ses deux enfants avec du mal à marcher, 90 ans. En la regardant, j'ai diagnostiqué une fracture de hanche. Et en l'examinant, une petite fracture de bassin... ça veut dire patauger dans la choucroute. Elle est allé se faire faire des radios. Mais ce n'est pas le plus important: sur son ordonnance comme traitement habituel se trouvait: du stilnox, du temesta, un antidépresseur et du tahor contre le cholestérol! Tout le monde connait mes positions concernant les trois premiers qui favorisent les chutes et les benzodiazépines les démences , mais a-t-on besoin d'un anti-cholestérol à 90 ans? Pour diminuer modestement le risque cardiovasculaire dans quelques années?  Heureusement elle ne prenait rien pour Alzheimer, ça aurait pu. 

Puis un jeune homme est venu pour un doigt écrasé depuis un mois qui ne retrouvait ni sa force ni sa sensibilité. J'ai proposé qu'il fasse sa propre kiné en effleurant son doigt avec une plume, en reconnaissant tactilement les différentes surfaces, il s'est fichu ouvertement de mes propositions. Mais ce n'est pas moi qui ai le doigt écrasé. 

Heureusement un autre jeune avec un doigt écrasé m'a pris plus au sérieux: son doigt est comme cartonné et c'est extrêmement désagréable.
Puis on est passé à son père qui s'est fait opéré du genou pour des douleurs de plus en plus pénibles: le chirurgien a corrigé la courbure du tibia ( vous voyez, vous avez les jambes comme Lucky Luke), et a laissé tranquille le genou, et le patient souffre toujours autant. 

Vers 11h30 un jeune femme m'annonce qu'un de mes patients vient de mourir de mort subite: il était sur le fil du rasoir depuis treize ans, mais il venait de faire toute une batterie d'examens cardiologiques rassurants, et on a encore plaisanté ensembles il y a une semaine! 

Une autre patiente assez hautaine est venue en consultation avec son mari. La semaine dernière elle m'avait demandé assez sèchement devant mon retard: "on fait comment pour passer à l'heure chez vous?" Cette fois-ci , elle voulait absolument que je signe le papier du médecin traitant après m'avoir pratiquement poussé à lui ordonner une radio, car elle avait mal au dos depuis deux jours!
J'ai laissé un grand blanc dans la conversation, lui ai expliqué que j'étais complète.... elle insistait. Comme je me levais pour chercher un papier vierge en lui expliquant que dés qu'elle pourrait elle change de médecin, son mari l'a rabrouée: " mais enfin, tu vois bien qu'elle ne veut pas signer!" Merci le mari, lui je me le garderais bien.

Et pour finir j'ai fait ma compta du jour : 666 euros!  Un coup de mon patient dans l'au-delà?   :)  Fripon!

mardi 23 avril 2013

Gardénal

Un de mes patients prend du gardénal pour son épilepsie, une vieille molécule ayant tout un tas d'effets secondaires, c'est pour cela qu'elle n'existe plus que dans l'indication épilepsie.
Néammoins j'ai décidé de lui faire arrêter. Mais pas facile, car ça ne s'arrête pas comme ça. Depuis des années je le supplie de voir un neurologue, chose qu'il me promet " pour plus tard".
Alors j'ai utilisé un truc que je fais régulièrement quand je veux faire arrêter un traitement à un patient: la traque aux effets secondaires:

·         réveil difficile avec parfois difficultés pour articuler,
·         troubles de la coordination et de l'équilibre,
·         rarement des vertiges avec céphalées,
·         réactions cutanées le plus souvent sous forme d'éruptions maculo-papuleuses morbiliformes ou scarlatiniformes,
·         possibilité de réactions cutanées graves (...)
 Très rares cas d'hépatites.
·         syndrome d'hypersensibilité : 
·         arthralgies (syndrome épaule-main ou rhumatisme gardénalique),
·         troubles de l'humeur,
·         anémie mégaloblastique par carence d'acide folique.   doctissimo

"Alors monsieur, vous avez l'un d'entre eux?
- J'ai des problèmes aux épaules depuis quelques temps, je soupçonne mon médicament. J'ai compris, je vais voir mon neurologue". 


lundi 22 avril 2013

Exit Rohypnol

Ca y est, le Rohypnol n'existe plus! Cette benzodiazépine tant appréciée en usage détournée a vécu. Le labo assure que ce n'est pas pour raison de pharmacovigilance, soit. N'empêche qu'il y en a eu des problèmes avec.
"Malgré sa demi-vie longue, le flunitrazepam aurait donné lieu dans les années 80/90 a des usages dits "festifs" par les toxicomanes expérimentés. On nomme cela se faire une "fiole", parce qu'il est mélangé à d'autres psychotropes, (morphiniques, alcool, ...). L'existence de comprimé à 2 mg favorisait ce genre de "voyage" spécial ou les usagers perdent le contrôle d'eux mêmes et peuvent avoir des comportements illégaux et/ou dangereux, sans qu'après le "réveil", ils n'en n'aient aucun souvenir. Depuis l'année 2001, le flunitrazepam est soumis à une réglementation particulière concernant sa prescription et sa délivrance: Wikipédia


Ca me rappelle toute une époque où je remplaçait un médecin ayant une foule de toxicomanes dans sa patientèle. Et je regrette de le dire, tous plus menteurs les uns que les autres:
- " j'ai perdu mon ordonnance, il faut me la refaire, je vais être en manque.
- Mon chien a mangé l'ordonnance, elle est inutilisable.
- je viens en avance car je voudrais repartir avec une ordonnance propre avec tout dedans
- Promis, je diminue à la prochaine" etc.
A l'époque le Subutex n'existait pas, voilà pourquoi les toxicos carburaient au tranxène et rohypnol, rivotril et diantalvic quand ils n'avaient plus les moyens de s'offrir du sérieux, c'est à dire de l'héroïne. 
Comme quoi, la différence entre   médicament psychotrope" légitime" et drogue illégale n'existe que dans le fait que l'on prend un stylo et une ordonnance pour la première catégorie ( et c'est remboursé par la Sécu, consultation plus médocs), et on se fournit dans la rue pour la deuxième.

samedi 20 avril 2013

Techniques commerciales limites

Mon associée a failli se faire avoir par un vendeur de biduleries absolument inutiles pour un cabinet de médecine générale:
" Bonjour docteur, non ce n'est pas du tout une démarche commerciale. Nous vous proposons de faire des audiogrammes à votre cabinet. Il suffit d'en pratiquer quatre par mois pour rentrer dans vos frais. Mais avez-vous une salle isolée?
- Non, mais mon associée n'est pas là tous les jours.
- Très bien! Je vous explique: vous démarrez l'audiogramme dans son cabinet quand elle n'est pas là, et vous faites vos consultations dans votre cabinet.
- Il faut que je lui demande la permission!
- Oui je comprends, mais en attendant rien ne vous empêche de signer, on verra les détails ensuite".

Ça sent l'arnaque! On ne fera jamais quatre audiogrammes par mois, sachant que sa patientèle est plutôt enfantine et la mienne plutôt adolescente et jeunes adultes. Et quel mépris envers  moi de disposer d'office de mon cabinet avec la porte ouverte et tous les petits secrets de mes patients visibles par tout le monde! ( j'ai des dossiers informatiques et papier)! Elle s'est vite repris et m'a prévenu qu'elle donnait une réponse défavorable, mais je l'attends de pied ferme, ce paltoquet qui lui a promis de me téléphoner pour me convaincre de l'utilité de telles pratiques. 

Je me suis déjà fait avoir avec un appareil à électrocardiogramme avec lecture à distance par des vrais cardiologue... qui ne sont pas inscrits au conseil de l'ordre, ça suffit.

Ca doit aider à ne pas se faire avoir, j'aurais été heureuse de l'avoir dans les mains dés les premiers temps de mon installation.

Epidémie de chlamydias

En ce moment j'ai affaire à une épidémie de chlamydia, un cas par semaine environ! Comme c'est peu symptomatique chez les messieurs, ce sont surtout les dames qui me consultent.

Et ce n'est pas facile: comme c'est une maladie sexuellement transmissible, cela veut dire que l'une personne du couple a fauté. Si c'est la femme: " comment le dire à mon compagnon?"
En réponse à cela, le biologiste m'a proposé une réponse-mensonge gros comme une maison " on attrape de tout dans les toilettes publiques, c'est dangereux".
Mais moi j'ai besoin de savoir afin que la personne incriminée contacte son ou ses partenaires et stopper la course infernale du microbe. 

Hier une jeune fille était vernie: " chlamydias, gardnerella et  uréaplasma"
"Docteur j'ai peur, j'ai des chlamydias et j'ai appris que cela peut rendre stérile. 
- Il faut le dire à votre compagnon madame!
- Oui mais il dit que c'est sûrement moi, qu'il n'a rien et que je l'ai sûrement attrapé dans les WC publics.
- Mais enfin, vous savez que ce n'est que des bêtises. De plus je vous connais depuis longtemps, je sais que vous n'aviez rien avant. Et vous ne vous êtes pas demandé s'il pouvait avoir le SIDA? S'il vous aime il fera tous les examens".    

J'ai un mauvais feeling, ça va  peut-être  se transformer en rupture, car ce que le monsieur ne comprend pas c'est qu'il est insupportable pour une jeune femme de penser qu'elle deviendra peut-être stérile à cause d'un microbe qu'on peut soigner avec des antibiotiques, sur trois semaines quand même.

mercredi 17 avril 2013

Pétage de plomb

Je n'avais jamais raconté l'histoire de ce médecin qui avait pété un câble et que j'ai dû remplacer de toute urgence; le frère d'un ami.
Il avait une grosse patientèle, qui je pense lui paraissait de plus en plus pesante. Alors pour se défouler il allait au café du coin fréquenter des chambres déjà occupées par des jolies dames et il faisait du piano toute l'après-midi pendant que les patients attendaient patiemment dans la salle d'attente. 
Le conseil de l'ordre s'en est ému et l'a déclaré inapte au travail durant quelques mois le temps qu'il soit expertisé et se  pose . 
Inutile d'écrire que je ne voyais pas plus de 15 patients par jour, le gros de la patientèle ayant fui vers d'autres médecins (apparemment) moins fragiles.  Je n'ai jamais autant joué à Tetris et pris autant de cafés. 
Mais il travaille encore. 
Pas facile de se reconvertir quand on a autant d'années de libéral derrière soi. En y réflechissant, être libéral c'est un peu une voie de garage, on peut en sortir parfois pour devenir médecin coordonnateur en maison de retraite, ou pour ceux qui veulent carrément passer de l'autres côté, médecin de la Sécu, autrement dit le flic. 

lundi 15 avril 2013

Guérit-on de la maladie mentale?

Une de mes patientes est sortie d'une dépression grave il y a trois ans. Elle ne prend plus rien qu'un peu de théralène le soir. Mais la dépression a été une descente aux enfers durant quelques années avec hospitalisation  en milieu psychiatrique. Elle en a gardé une baisse de l'estime d'elle-même.

Alors parfois elle retombe un peu, puis elle remonte, elle a trouvé il y a quelques mois un travail avec peu de responsabilité et beaucoup de contacts, ce qui lui convient totalement. Mais parfois elle ne se sent pas complètement à sa place, elle a des coups de mou, selon les événements au travail: elle ne s'est pas déclarée travailleur handicapé car elle est courageuse et ne veut pas être montrée du doigt. 

Et elle m'a dit ce jour: " de toute façon la maladie mentale, ça ne se soigne jamais vraiment". En entendant cela j'ai bondi: cela ne se soigne effectivement pas comme une maladie physique, car un trait de caractère ne se soigne pas non plus.  Je m'explique: cette patiente est scrupuleuse, a toujours peur de mal faire, et quand elle est en forme on peut être sûr que le travail sera bien fait, qu'on ne repassera pas après.
Quand elle est dans une phase de déprime, cette idée l'obsède tant qu'elle en est à ne plus rien faire.  Le tout est de remonter la pente.  J'y arrive avec mes petites potions pour le moment.

Donc les qualités peuvent devenir des défauts et vice et versa. Le monde a besoin de toute la diversité des caractères humains pour pouvoir tourner et on ne peut pas gommer tout ce qui ne rentre pas dans le moule.

Il y a un livre de Bernard Werber formidable L'Ultime Secret http://fr.wikipedia.org/wiki/L'Ultime_Secret
où on utilise les aptitudes des malades mentaux pour faire un travail particulier. Autant dire que j'ai adoré et que vous recommande la lecture à tous.




samedi 13 avril 2013

Surmédecine

Je  ne suis pas très contente et vais la faire courte:

J'ai fait opérer une nonagénaire d'une prothèse de hanche car la vie n'était plus supportable, elle ne bougeait plus et prenait antiinflammatoires sur antiinflammatoires, mais rien d'autre. Jusqu'ici tout va bien, elle marche, ça a été une réussite. 

mais le fils m'a appelée pour la suite des soins:
" Bonjour docteur, il faudrait que ma maman vous voit pour la suite des soins. On lui a mis du miansérine (antidépresseur Athymil), du lysanxia ( benzodiazépine), on lui a programmé une IRM du cerveau et un rendez-vous chez un neuropsychiatre". 

J'ai bondi: la patiente déménage tranquillement et calmement depuis quelques années, elle est très entourée par sa famille, ne se plaint de rien ( sauf de sa hanche). Ce médecin est près à agrandir le trou de la Sécu pour une nonagénaire qui ne demande rien? Il veut peut-être faire du neuf avec du vieux. 

J'en ai parfois marre. Heureusement le fils s'est rangé à mes arguments. Mais pour une à qui on fichera la paix, combien subissent de la "Surmédecine"?

vendredi 12 avril 2013

Petite fatigue

Un jeune patient baraqué comme Superman:
" docteur, je suis fatigué, j'ai des aphte et un rhume.
- Que faites vous dans la vie? Et comme sport?
- je suis maçon, sinon je fais 6 heures de rugby par semaine, six heures de muscu.
- et vous sortez?
- Oui, jusqu'à six heures du matin le samedi et dimanche". 

Voilà ce qui s'appelle vivre pleinement

La nuit portant conseil: des suppos de doliprane!
Tout bête.

jeudi 11 avril 2013

Patche de Doliprane

J'ai passé une personne âgé en hospitalisation à domicile, système qui se démocratise, surtout pour les fins de vie: quand on agonise entouré de ses proches avec le confort de l'hôpital ( infirmiers, aide-soignants et médecin coordonnateur au bout du fil), c'est un plus, à condition que la famille veuille ou puisse s'impliquer.
Donc j'ai mis tout en place pour cette octogénaire atteinte d'un Alzheimer au dernier stade, qui ne s'alimente plus depuis deux jours. Je lui ai arrêté ses traitements pour Alzheimer depuis trois ans, devant le peu d'efficacité de ceux-ci et depuis elle n'a rien pris, même pas un petit Doliprane.

Or les infirmières nouvellement arrivées sur place m'appellent hier:  " docteur elle souffre, elle gémit et grimace.
- Je suis surprise, elle ne souffrait pas jusqu'alors.
- On pourrait peut-être lui prescrire de la morphine?
- Je vais réflechir".
Et j'ai appelé le médecin coordonnateur, lui ai demandé si elle connaissait du doliprane autre qu'en intra-veineux ( puisqu'elle n'avale plus rien). Rien, nada, absolument aucune molécule en dehors de la morphine sous-cutanée ou en patch. Inutile de dire que la famille était un peu ahurie.

Alors si quelqu'un lit ses lignes, s'il invente le patch de doliprane pour ces personnes en fin de vie qui n'ont jamais rien pris.

mercredi 10 avril 2013

Consultation dans le métro

Dans le métro un type toussait copieusement sur moi, je sentais son souffle dans mon cou. J'ai tenu un moment, foule oblige, puis gentiment je lui ai dit
" Pourriez-vous ne pas tousser sur moi s'il vous plait?
- Désolé, je n'arrive plus à respirer, j'ai un rhume.
- En ce cas là j'ai ce qu'il vous faut: du thym et cinq gousses d'ail dans une soupe pour le soigner.
- Bonne idée, je le ferai".
Il était hilare! Comme quoi on n'est pas obligé de se disputer dans le métro; Aurais-je dû lui demander 23 euros? :)

Lanceurs d'alerte.


Les lanceurs d'alerte, ces scientifiques ou simples citoyens qui attirent l'attention sur des risques sanitaires et environnementaux, seront désormais protégés. Le Parlement a adopté, mercredi 3 avril, la proposition de loi qui vise à préserver ces"lanceurs d'alerte" et à renforcer l'indépendance des expertises scientifiques. Un sujet brûlant, que ramènent régulièrement au-devant de l'actualité des dossiers comme la prescription de médicaments à risque, l'exposition aux pollutions chimiques ou aux ondes électromagnétiques.


C'est une super-bonne idée! Evidemment si l'on comprend " Msieur, le docteur Cahuczac est un méchant monsieur, il gruge le fisc",  "Msieur, il a fait une erreur médicale et son patient est mort", "Msieur mon confrère est un picolo, il risque l'erreur médicale  à tout instant"; là ça rappelle Vichy et ce n'est pas beau. 

Mais si on prévient les autorités " plusieurs de mes patients son parkinsoniens suite à la prise de Vastarel" ou " plusieurs de mes patients ont eu des idées suicidaires suite à la prise de Champix ( contre le tabac) ou le ro-accutane (contre l'acné), on a tout bon. 

L'idée n'est pas de dénoncer comme l'a souligné un confrère blogueur.  http://docteurdu16.blogspot.fr/2013/04/les-lanceurs-dalerte-desormais-proteges.html
D'ailleurs tout mon blog est tourné vers le fait d'éclairer les lecteurs entre autres sujets  sur ce qu'ils peuvent prendre comme médicaments. 

Comme vous tous, simples citoyens ou autres vous pouvez alerter sur les sujets qui vous chatouillent un poil trop.


Desorganisation

Ma pauvre octogénaire en avait eu des aventures; tout d'abord, à l'annonce de son cancer elle était tout à fait désireuse de rentrer chez elle sans traitement ( cancer de la tête du pancréas métastatasé),  mais au bout d'un mois la situation s'est aggravé, entre des escarres et des douleurs insupportables. J''ai démarré la morphine, mais en ville on est un peu frileux et j'en étais à 40 mg matin et soir quand elle est allée aux urgences d'elle-même.
La sœur m'a appelé: " au secours docteur, ils ne veulent pas la garder. Faites quelque chose!"
Je téléphone au médecin des urgences qui est presque hystérique au téléphone: " je ne peux pas garder votre patiente, je n'ai pas de place, et même si je la gardais, il n'y a pas de place en aval". Pauvre type, la vie ne doit pas être drôle aux urgences, quoique j'ai pesté copieusement  contre lui au moment même.

La patiente rentre chez elle, le lendemain elle m'appelle " faites quelque chose, je ne peux plus rester ici, je ne peux plus rien faire". Effectivement elle nage dans un tas de choses peu ragoutantes au fond de son lit.

J'appelle l'hospitalisation à domicile qui me promet de venir voir l'état de la patiente dans l'après-midi, ce qu'elle fait ( un infirmier); alerté par ce dernier le médecin en personne se déplace... et l'hospitalise illico. 

J'appelle ça une légère désorganisation des services de santé.

lundi 8 avril 2013

Décès

Une de mes octogénaires vient de décéder. Elle a vécu une vie particulière entre sa mère, son mari, sa soeur et les deux chiens; personne ne s'est jamais quitté.
A part que la mère est partie suite à  une maladie douloureuse, puis ce fut le mari, et les chiens ont suivi,  maintenant c'est elle et la dernière, la soeur  n'a plus que ses yeux pour pleurer entre un fourneau hors d'âge pour se chauffer, son canari et son monceau de meubles entassés.

La vie ça peut être une suite de pertes, l'univers se rétrécit et les vivants n'ont plus que leurs souvenirs. Triste. 

Connaissez-vous le mot résilience? 
La résilience est un phénomène psychologique qui consiste, pour un individu affecté par un traumatisme, à prendre acte de l'événement traumatique pour ne plus vivre dans la dépression et se reconstruire. La résilience serait rendue possible grâce à la structuration précoce de la personnalité, par des expériences constructives de l'enfance (avant la confrontation avec des faits potentiellement traumatisants) et parfois par la réflexion, ou la parole, plus rarement par l'encadrement médical d'une thérapie. wikipédia

Ce mot est très fort, et il faudrait tous avoir cette aptitude

jeudi 4 avril 2013

Superman est mort

Superman est mort! Un quadragénaire terrassé par le cancer. Il s'est battu brillamment jusqu'au moment où on lui a fait comprendre que " toutes les possibilités thérapeutiques avaient été épuisées". Un euphémisme. 
Je me souviendrai toujours de sa gentillesse, sa serviabilité, sa joie de vivre, son courage. 

Et j'en ai une autre si je puis dire sur le feu: un cancer du pancréas que j'ai gardé au domicile le plus possible. Maintenant elle est sous pompe à morphine en soins palliatifs. Pendant des années je ne suis jamais sortie de chez elle sans un petit cadeau: des pommes, des framboises, des pommes de terre etc. Comme c'en devenait un peu génant car elle me payait aussi les consultations, je lui ai offert un jour un magnifique agenda de labo avec des gravures à chaque page, du temps où l'on avait encore des petits cadeaux.

Je n'oublie pas non plus celui qui me donne une bonne bouteille de vin  chaque visite pour mon pacsé, seulement lui n'a pas de crabe. 

mardi 2 avril 2013

no one knows



J'adore.

Stratégies

Je n'ai pas dit comment j'en avais été à signer le CAPI avant le gros des médecins?  Une gentille dame de la Sécu est venu me le présenter pratiquement en avant première " docteur, nous proposons des nouveaux modes de rémunérations à la performance et nous avons pensé à vous car vous n'êtes pas loin des objectifs".
Je rappelle un ou deux objectifs en question: un pourcentage appréciable de femmes de 50 à 70 ans qui ont pratiqué une mammographie et de personnes ciblées qui reçoivent le vaccin antigrippal, , peu d'antidépresseurs, pas trop d'antibiotiques  etc. 

Et j'ai appris un peu plus tard que la Sécu avait fait signer ceux qui étaient le plus susceptibles d'être convaincus du bien-fondé de ce système avant de généraliser la manoeuvre à tous les médecins.

Ca n'a peut-être rien à voir, mais cela me fait penser avec ce qui se passe à Chypre: 
Les taxations des comptes de plus de 100 000 euros, les taxes sur les dépots bancaires..
On peut le faire peinard sur une île qui ne compte que 1 138 000 habitants en 2012.  Et c'est quand qu'un autre pays européen va "profiter" de cette expérience de prendre un pays en otage? 
J'ai adoré Chypre en vacances et j'en suis désolée pour eux. 

lundi 1 avril 2013

Le médecin de Koh-Lanta s'est suicidé


Thierry Costa, 38 ans, médecin de l’émission phare de téléréalité de TF1, s’est donné la mort ce lundi un peu plus d’une semaine après la mort d’un candidat de l’émission lors du tournage de la 16e saison.

 
Son suicide survient un peu plus d’une semaine après la mort d’un candidat de l’émission âgé de 25 ans, Gérald Babin, au premier jour de tournage de la 16e saison, dans l’île de Koh Rong, au large de Sihanoukville (sud).
«Nous apprenons avec consternation que le docteur Thierry Costa s’est donné la mort aujourd’hui au Cambodge», déclare ALP. «Thierry Costa, 38 ans, médecin-urgentiste (...) était également le médecin de Koh-Lanta depuis quatre saisons. Son très grand professionnalisme et son humanité à l’égard des participants et des équipes de production ont toujours fait l’unanimité. Il a laissé une lettre qui a été transmise à sa famille», ajoute le texte.
«Cet événement tragique doit inciter ceux qui accusent et commentent sans discernement à faire preuve de responsabilité», ajoute ALP dans le communiqué.
Dans la lettre posthume laissée par Thierry Costa, il dit avoir été «sali» dans les médias par «des articles mensongers» : «Ces derniers jours, mon nom a été sali dans les médias. Des accusations et suppositions injustes ont été proférées à mon encontre», écrit le médecin, dans la lettre dont l’AFP a obtenu une copie par la société prestataire de la production de l’émission, pour laquelle travaillait le médecin.
Thierry Costa avait commencé la médecine il y a vingt ans. Il s’était spécialisé dans la médecine d’urgence après des études de médecine générale. Il exerçait à la fois en cabinet et à l’hôpital, selon la production.
http://www.liberation.fr/medias/2013/04/01/le-medecin-de-koh-lanta-s-est-suicide_892825

Je ne peux que compatir. C'est l’extrême de la pression que l'on peut avoir dans notre métier. C'est beaucoup de responsabilité, et ce n'est pas parce qu'en ville on se contente de manier le stylo ou de taper les ordonnances sur ordinateur qu'on en a moins.