L'abus d'anxiolytiques pourrait favoriser l'apparition de la maladie d'Alzheimer mais il n'existe aucun lien de causalité directe démontré, a déclaré jeudi le professeur Bernard Bégaud, responsable d'une étude sur la question.
Le magazine Sciences et Avenir publie dans son numéro d'octobre, en vente jeudi, les premiers résultats d'une étude épidémiologique sur les benzodiazépines - médicaments psychotropes - réalisée sous l'autorité du directeur de l'unité de recherches "pharmaco-épidémiologie" de l'Inserm à Bordeaux.
Selon cette étude, qui devrait être rendue publique d'ici la fin de l'année après validation, l'utilisation prolongée de "BZD" accroîtrait de 50% le risque d'entrer dans la maladie d'Alzheimer, une maladie dégénérative provoquant des lésions au cerveau.
Sur les 200.000 nouveaux cas d'Alzheimer recensés en France chaque année, de 16.000 à 31.000 cas seraient imputables aux psychotrophes, selon des projections.
Les médicaments en cause sont des molécules fréquemment prescrites en France : Valium, Témesta, Xanax, Lexomil, Stilnox, Mogadon, Myolastan, Imovane ou encore Tranxène.
Le Pr Bégaud a critiqué jeudi la présentation de Sciences et Avenir - qui titre "Ces médicaments qui favorisent Alzheimer" - en soulignant que ces projections étaient à mettre au conditionnel.
"Il n'y a pas de lien de causalité directe démontré", a-t-il dit sur France Info. "Il n'a jamais été démontré qu'ils entraînaient directement Alzheimer."
Huit autres études sur la question ont déjà réalisées, dont certaines concluant à un possible lien entre la prise prolongée de psychotropes et le vieillissement cérébral.
"Il y a un dossier potentiel, un doute, il faut absolument l'explorer", mais "il faut rappeler aussi que ces médicaments sont utiles, voire indispensables, et surtout veiller à ne pas inquiéter les gens", dit Bernard Bégaud.
"Quand je vois le titre (du magazine), je me dis que quelqu'un qui voit ça va être terrorisé", a-t-il commenté.
SIX MILLIONS DE FRANÇAIS CONCERNÉS
L'étude a été menée durant vingt ans auprès de 3.777 sujets âgés de 65 ans et plus résidant dans deux départements du sud-ouest de la France, la Dordogne et la Gironde, et qui ont accepté d'être suivis à vie. La durée de prise de médicaments oscillait de deux à plus de dix ans selon les personnes.
Selon l'étude, la détérioration cérébrale se ferait sentir cinq à huit ans après le début des premières prises.
"Les responsables sanitaires devraient sérieusement s'inquiéter. (...) Cette affaire est une vraie bombe", déclare dans Sciences et Avenir le professeur Bégaud, citant le scandale du Mediator (...)
L'épidémiologiste a nettement modéré ses propos jeudi.
"Nous ne disons pas qu'il y a un lien direct entre la consommation - a fortiori justifiée - de ces produits et l'apparition d'une démence type Alzheimer. C'est majeur de le dire pour la population", a-t-il souligné sur France Info.
Il a toutefois invoqué le principe de précaution pour rationaliser la consommation d'antidépresseurs qu'il juge abusive en France.Quelque six millions de personnes, en majorité des femmes, prennent des antidépresseurs en France. Il y a encore peu championne d'Europe de la consommation de "pilules du bonheur", la France occupe désormais la troisième place en la matière, selon l'assurance-maladie.
Dans près de 80% de cas, les psychotropes sont prescrits par des médecins généralistes.
Pour Bernard Bégaud, il faut se servir du "doute" sur leur inocuité pour "revenir à une utilisation plus normale de ces produits en France".
"Il faut absolument qu'il y ait une campagne urgente de rationalisation de ces produits, d'abord parce qu'il n'est pas normal d'être traité quand on n'en a pas besoin ou d'être traité trop longtemps", a-t-il expliqué.
"Il y a une anomalie française flagrante, et il faut la corriger", a-t-il conclu.
La maladie d'Alzheimer touche aujourd'hui quelque 800.000 personnes en France. (...)
Sophie Louet, édité par Yves Clarisse
http://www.lepoint.fr/fil-info-reuters/l-abus-de-psychotropes-pourrait-favoriser-alzheimer-29-09-2011-1378717_240.php
J'espère juste que ce fait ne restera pas anecdotique et que les pouvoirs publics s'en inquièteront comme il se doit.
Ma grand-mère a pris pendant longtemps des somnifères, pour contrer les effets de son café (matin, 10h, midi, 16h, 18h...), et lorsqu'elle a développé la maladie d'Alzheimer, nous nous sommes dits que peut-être, ce traitement y était pour quelque chose. Des études menées sur les données de la sécurité sociale, qui a bien des historiques des traitements remboursés sur tous les patients (ses somnifères étaient bien sûr remboursés), permettraient sans doute de mettre au jour des parallèles entre des traitements de ce type et l'apparition de maladies dégénératives, parallèles qui permettraient ensuite de lancer de vraies études. Malheureusement, nous sommes bien loin de pouvoir prêter ces données, même anonymement, pour de telles études...
RépondreSupprimerAdressez-vous à l'AAAVAM qui recense les cas d'effets secondaires au benzo. Peut-être qu'elle en sait plus et peut collecter les données.
RépondreSupprimerDr vincent